Né en Tchécoslovaquie en 1930, d’une mère tchèque et d’une père polonais, Maxwell Smart immigre en bas âge en Pologne. Sa famille, qui œuvre dans l’industrie vestimentaire et de la chapellerie, se joint à la communauté juive de Buczacz qui compte environ 5 000 personnes sur une population totale de 20 000 habitants.
Pendant ses premières années à l’école, Maxwell se passionne pour les cours d’arts plastiques, mais en est cruellement privé lorsque les Russes et les Allemands se bousculent pour prendre le contrôle de Buczacz, durant la Deuxième Guerre mondiale. Les Allemands, après avoir pris le pouvoir, évacuent tous les citoyens de la zone militarisée, à l’exception des Juifs. Ces infortunés sont forcés d’embarquer dans des camions et transportés soit aux camps d’extermination soit dans une forêt à l’extrémité de la ville où ils sont systématiquement massacrés, leurs cadavres empilés dans des fosses communes.
Maxwell fut témoin de l’enlèvement de son père que l’on emmena pour le fusiller. Contrairement, à sa mère et sa sœur, Maxwell réussit à s’échapper des camps de la mort et à survivre à la guerre sur le terrain d’un agriculteur sympathique qui défiait les voisins hostiles. Les épines aiguës des branches de sapins qui couvraient le trou dans lequel Maxwell se cachait pendant les raids des S.S., vivent encore dans l’imagerie de ses tableaux, de même que les émotions qu’il vécut lorsque, jeune gamin de onze ans, il admirait le ciel de son cachot dans la forêt et contemplait la liberté infinie du cosmos.
En 1948, à l’âge de 17 ans, Maxwell arrive à Halifax, en Nouvelle-Écosse, à bord du navire le S.S. General Sturgess, prend le train vers Montréal où il est abrité par le Congrès juif canadien, à titre d’orphelin de guerre. Deux ans plus tard, Maxwell est déjà marié et subvient à ses propres besoins.
L’art qui le soutenait moralement pedantpendant sa longue et fructueuse carrière d’homme d’affaires joue un rôle plus important dans sa vie depuis l’acquisition d’un espace immobilier qui est devenu son atelier. « Je peins constamment et je peins dans mon atelier depuis les 20 dernières années. La peinture est un genre d’évasion pour moi. Je suis dans un endroit différent, déconnecté de la réalité puisque je ne crée pas des tableaux réalistes », explique Maxwell; « je peins l’univers, les espaces libres où l’on peut errer ».
La liberté et l’évasion sont les thèmes courants des explosions de couleurs qui font figure dans les œuvres de Maxwell et qui prennent racine dans l’expressionnisme abstrait nord-américain et européen. Après avoir expérimenté avec la peinture figurative au début des années 60 (The Goddess Justitia), Maxwell a passé les années 70 immergé dans le Tachisme de Paul-Émile Borduas (1905-1960) et dans L’Automatisme de Jean-Paul Riopelle (1923-2002) dont Maxwell admire les œuvres. Poussé par le désir d’exprimer de l’émotion pure, Maxwell se mit alors à appliquer la peinture à l’aide d’un couteau à palette, à coups puissants et directionnels.
Le printemps (Spring) et l’automne (Composition in Red) exudent les couleurs et les sensations de la terre, du feuillage et même de la température de l’air. Parfois, Maxwell laisse couler de la peinture de son couteau à palette (Machinery) en traçant des formes circulaires, tel le peintre gestuel, Jackson Pollock (1912-1956). Power and Victory, l’une de ses toiles à grande échelle, fait allusion aux pistolets en marche tels des soldats, teints rouge par le sang de la bataille. Mais en même temps, la composition se métamorphose en une forêt d’arbres sentinels, témoins de l’inhumanité de l’homme. « Il va sans dire, » s’exclame Maxwell, le spectateur « peut tout imaginer ».
Dès 2003, Maxwell explore les frontières du réalisme dans sa représentation des planètes. Il les cache dans des petits coups de couteau à palette abstraits et dans des zones de couleur qui suggèrent des nuages, la création cosmique et du feu solaire. Les corps ronds de l’artiste s’inspirent de Wassily Kandinsky (1866-1944), l’idole de Maxwell, dont les cercles géométriques et angles et le groupe d’artistes d’inspiration expressionniste, Der Blaue Reiter révolutionnèrent la peinture. Maxwell s’en éloigne tout de même puis qu’il relie ses sphères au monde physique en leur donnant une tri-dimensionnalité solide.
« Les tableaux de Kandinsky étaient légers. Les miens sont plus lourds, plus dramatiques. Mon idée des débuts (le thème récurrent de la Création) est explosive, la sienne est plus sereine. Néanmoins, c’était un rebel. Il n’a pas voulu se conformer. Il voulait être libre et voilà mon idéal », dit Maxwell. Ce désir de liberté est même évident dans la façon dont Maxwell a mis à l’écart la table sous une vase de fleurs dans la toile de 1994, Joie de Vivre No. 3, dans laquelle seule une zone ombrée suggère une surface de support.
Des fleurs stylisées peintes durant les trois dernières années trouvent leurs caractéristiques dans les pétales impasto (technique d’empâtement de peinture), certaines en plusieurs tons de peinture (Daisies in a Vase). Les sujets de Maxwell deviennent donc symboliques. Ce ne sont pas des portraits floraux, mais ils nous parlent de la vie et de la survie, tels des têtes de fleurs qui semblent trop lourdes pour les tiges qui les tiennent debout, malgré tout.
« Je suis un survivant de l’Holocauste. J’ai survécu les températures froides. J’ai survécu quand il n’y avait rien à manger et que je devais voler une pomme de terre pour me nourrir. J’ai survécu aux Nazis. J’ai survécu à des agriculteurs qui voulaient me tuer. J’ai survécu », proclame Maxwell. En dépit des traumatismes de sa jeunesse, la perte des 63 membres de sa famille proche et étendue, et le choc de se trouver seul dans un environnement hostile, Maxwell demeure un optimiste. Il accueille la pluie d’un cœur joyeux et ses tableaux sont témoins de son appréciation de la vie et d’être en vie. C’est pour cela que, lorsque les gens entrent dans sa galerie d’art, ils peuvent sentir le parachèvement du rêve d’une vie qui était de faire de l’art sa vie. La vitalité des toiles de Maxwell nous donne l’impression d’être encore plus vivants.
– écrit par Heather Solomon-Bowden, B.F.A.
